23 janvier 2011

« L’interdiction de certains signes religieux dans l’espace public est-elle compatible avec le concept de Libre Pensée ? »

par Eddy ROMMEL

Libre pensée : De quoi s’agit-il ?

Ces deux mots font nécessairement appel, d’une part au droit de penser librement, droit qui s’apparente alors à une liberté d’opinion et d’expression, et donc à une dimension juridique et, d’autre part, à une dimension plus philosophique et méthodologique s’attachant à la capacité des individus de penser sans contrainte, faisant ainsi appel à la méthode communément appelée libre examen. Actuellement, en Belgique, c’est le plus souvent la capacité de fonder son propre jugement et de se soustraire à la pression de l’environnement culturel, de l’éducation et du dogme qui fait le plus souvent défaut.

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme proclame en son article 18 : Toute personne a droit à la liberté de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. Selon ce texte fondateur donc, légiférer sur le port des signes religieux, serait contraire à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Par ailleurs, cette liberté d’expression ne peut, en démocratie, se faire au détriment de la liberté d’autrui ni aller à l’encontre d’autres libertés, comme celle d’être jugé de manière impartiale, celle d’accéder à l’enseignement, etc etc. Ainsi, au-delà de la liberté d’opinion de chacun, il convient de s’opposer avec fermeté et détermination, sans compromis, à la revendication du droit d’enseigner, de véhiculer ou de promouvoir des valeurs contraires à la démocratie.  Il n’est ainsi pas tolérable qu’un professeur fasse état dans l’exercice de ses fonctions, de son attachement à une religion, fut-elle même reconnue par l’Etat, qui prône le créationnisme et nie les évidences scientifiques les plus élémentaires, qui proclame l’inégalité en droit des hommes et des femmes, légitimise la lapidation, ordonne l’assassinat d’hommes et de femmes pour raison d’expression pacifique de leur opinion. Il nous apparaît évident que la fonction de Juge ne peut être remplies de manière juste par des personnes et dans des lieux qui proclament de facto la supériorité d’un dieu, quel qu’il soit, sur l’homme et lui confèrent la capacité de jugement suprême.

C’est justement au nom de la liberté légitime de conviction, de croyance ou d’incroyance, qu’il convient impérativement d’éviter toute reconnaissance et tout financement par l’Etat de tous les cultes quels qu’ils soient. L’Etat ne pouvant matériellement ni les reconnaître ni les financer tous, il se doit de n’en reconnaître et de n’en financer AUNCUN et de les reléguer dans une sphère strictement privée. Notre propos ne consiste pas à s’attaquer aux croyants, aux non-croyants, ni même aux religions, ni à l’islam, ni à aucune autre, pour autant qu’elle soit respectable, mais de s’attaquer à la place que les religions occupent dans la société et à combattre les excès et dérives contraires à la dignité des hommes qui se développent dangereusement au sein des communautés religieuses et se propagent au nom d’une multiculturalité inévitablement à sens unique.

«A défaut d’un monde parfait, il est légitime de préférer un pays dans lequel les signes religieux ostentatoires sont interdis à un autre dans lequel ils sont obligatoires ! »